Suggestions de visionnement

La légende de Klaus

Par Sophie Archambault

Suggestions de visionnement

20 décembre 2023

Détail du fond d’écran de Alphacoders

Réalisé par Sergio Pablos et Carlos Martinéz Lopéz, Klaus est un film d’animation qui raconte les origines légendaires de celui que nous connaissons aujourd’hui sous le nom de «Père Noël».

Désopilant, intriguant, touchant et visuellement sublime, ce long-métrage considéré par les British Academy Film Awards comme le meilleur film d’animation de 2020 est l’occasion rêvée pour les petits et les plus grands de plonger tête première dans l’ambiance chaleureuse du temps des fêtes.

Le film s’ouvre sur le personnage gâté, paresseux et égocentré de Jesper Johansson, fils du chef de l’Académie royale de la Poste, qui refuse de se soumettre à l’entraînement dédié aux futurs facteurs de Norvège. Éreinté par son fils fainéant qui n’a pas de but autre que de jouir du luxe familial, le chef de l’Académie l’oblige donc à aller en mission à Smeerensburg, une petite ville austère et recluse du Nord. Jesper y est chargé d’établir un bureau de poste opérationnel, sans quoi il sera déshérité.

En arrivant à Smeerensburg, Jesper est frappé par la froideur – au sens propre et figuré – de cette ville, mais surtout par la malveillance des habitants. En parlant brièvement avec Alva, l’institutrice de la place devenue poissonnière, Jesper comprend que Smeerensburg est le théâtre d’une aversion ancestrale : la ville abrite les familles Ellingboe et Krum, et celles-ci se vouent une lutte incessante depuis des siècles et des siècles. Comment convaincre des gens qui entretiennent une haine sans début ni fin de s’écrire des lettres?

Désespéré et déprimé, Jesper, en explorant la ville, tombe sur un gaillard solitaire à la barbe blanche qui détient un atelier rempli de jouets, Klaus. Voyant là une échappatoire à sa situation, Jesper lui propose un marché : «Si vous acceptez de donner vos vieux jouets, je serai ravi de les livrer gratuitement.» Par le biais de rumeurs, de bouche-à-oreille et de ouï-dire, Jesper instaure alors un système postal dans lequel les enfants de la ville, en écrivant une lettre à Klaus, reçoivent en échange un cadeau durant la nuit.

Ainsi se construit tranquillement la légende du Père Noël qui, en incitant les enfants des deux familles à se réconcilier pour jouer entre eux, amène aussi leurs parents à mettre de côté leur rancune. Même Jesper, ne voulant au départ que remplir sa mission pour quitter cette ville, se retrouve à être happé par cette Smeerensburg qui, réchauffée par la cohabitation soudainement harmonieuse de ses habitants, devient de plus en plus chaleureuse.

 

Donner sans penser à recevoir

 

Si Noël est aujourd’hui régi par le capitalisme et la surconsommation, le film Klaus participe à redonner à cette fête le sens qu’on lui accorde à la base. Noël, réellement, est un moment unique de l’année où l’accent est mis sur la réalisation de gestes caritatifs, sur les réunions familiales et amicales ainsi que, surtout, sur l’accomplissement d’actions honnêtes, généreuses et pures. Bien que, au début du récit, Jesper ne livrait les cadeaux aux enfants avec l’aide de Klaus que dans l’optique de réussir sa mission et ainsi déguerpir au plus vite de Smeerensburg, la joie que ce geste provoque chez les habitants de la ville finit par avoir raison de son égoïsme.

 

Une bonne action désintéressée en entraîne toujours une autre.

 

Donner sans attente, pour Jesper et Klaus, devient un cadeau pour les autres, mais aussi un présent qu’ils se font à eux-mêmes; le bonheur qui irradie de la ville leur suffit amplement. Le facteur prend également conscience que, grâce à la légende qu’il est en train de créer, il s’effectue un processus de contagion de la générosité. Ces mêmes habitants qui ne se voulaient auparavant que du mal se mettent eux aussi à faire des actions de bonté, que cela soit en cueillant et en apportant des groseilles aux autres familles, en nettoyant des clarinettes ou en repeignant la clôture du voisin.

Ainsi, la distribution de jouets, dans ce film, n’est qu’une réalité de surface pour parler d’un aspect beaucoup plus important qui touche à Noël, soit le don de soi, sans aucun souhait de recevoir quelque chose en retour. D’ailleurs, Jesper, lors de l’une de ses virées nocturnes avec Klaus, lui fait avec humour le bilan des améliorations de la ville, témoignant ainsi de l’impact énorme qu’une action désintéressée peut avoir sur la communauté : «Le boulanger fait maintenant une ristourne aux Ellingboe, sans mettre de lame de rasoir dans la pâte. Et figurez-vous que les incendies criminels ont chuté de 70%! Je vous assure! Depuis quand n’avez-vous pas vu une maison brûler? Eh bien, voilà! En revanche, les brocantes et les barbecues sont très en vogue, comme si les gens étaient devenus complètement timbrés.»

 

Désapprendre la haine

 

Alors que les enfants Ellingboe et les enfants Krum se mettent à jouer avec leurs nouveaux jouets ensemble, les chefs de chaque clan familial interviennent auprès de ceux-ci en leur faisant bien comprendre que «les Krums et les Ellingboe ne se mélangent pas.» La tradition, selon les chefs, appuie bien sur «des siècles de haine glorieuse, transmise de génération en génération.» Ainsi, l’aversion que les deux familles se portent, dans Klaus, relève bien d’un apprentissage, d’une transmission qui est réitérée de manière aveugle à chaque nouvelle naissance.

À Smeerensburg, les parents, de peur que leurs enfants côtoient ceux du clan ennemi, ne les envoient pas à l’école. De ce fait, les deux familles se vouent une haine frénétique sans réellement savoir d’où celle-ci provient. Surtout, ils ne détiennent pas les connaissances nécessaires pour réévaluer de manière critique cette animosité ancestrale. Toutefois, les enfants, pour écrire leurs lettres à Klaus et ainsi recevoir un cadeau, doivent apprendre à écrire. L’écriture, dans Klaus, revêt donc une signification symbolique. En apprenant à écrire et, plus largement, en retournant à l’école, les enfants peuvent acquérir des capacités de communication qu’ils transmettent à leurs parents.

De ce fait, la légende de Klaus inverse le sens de la transmission générationnelle : plutôt que d’apprendre à leurs enfants à haïr sans raison, ce sont les enfants qui apprennent aux parents à entrer en contact avec autrui et à réellement dialoguer dans l’empathie, le respect et la bonté. Ainsi, les habitants de la ville se transforment et ne basent plus leurs relations sur la haine et l’exclusion, mais sur l’harmonie et l’acceptation.

Que cela soit pour passer un bon moment durant une soirée enneigée, pour rire un bon coup en famille ou tout simplement pour se reconnecter aux valeurs de Noël, Klaus est un film qui produit chez celui ou celle qui le regarde un véritable enchantement.

Joyeux Noël!

 

 

À PROPOS DE SOPHIE ARCHAMBAULT

Étudiante à la maîtrise en études littéraires, Sophie lit et écrit pour mieux saisir l’humain, la société, mais surtout le monde dans lequel elle évolue. Oiseau de nuit, c’est en multipliant des lectures nocturnes sur la spiritualité et le phénomène religieux que son intérêt marqué pour le concept du sacré s’est doucement développé. Amoureuse de la nature et de ses dangereuses beautés, de la mythologie, de l’histoire de l’art et de tout ce qui requiert de la créativité, Sophie prend plaisir à se rencontrer elle-même à travers ces passions pour ensuite mieux s’ouvrir au monde qui l’entoure.

 

Les opinions exprimées dans les textes sont celles des auteurs. Elles ne prétendent pas refléter les opinions de la Fondation Père-Ménard. Tous les textes publiés sont protégés par le droit d’auteur.

 

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