Des femmes inspirantes

Des femmes d’hier et d’aujourd’hui

photo Lucie Lepine

Par Lucie Lépine

Des femmes inspirantes

28 juin 2023

Crédit photo : Paolo Bendandi / Unsplash

On a souvent entendu lire les textes des prophètes de l’Ancien Testament : Isaïe, Jérémie, Amos, Osée…, mais pourquoi a-t- on oublié les noms des grandes femmes? C’est en espérant y remédier que j’ai voulu vous présenter, depuis quelques mois, des femmes inspirantes comme Marie, Myriam, Houlda, Vasthi, Esther, Ruth…

Ensuite, je vous ai présenté aussi quelques femmes de l’Évangile en soulignant l’attitude de Jésus envers elles. Certes, ce serait une erreur de considérer Jésus comme un militant radical de la promotion des femmes. Mais en tant qu’homme libre intérieurement, il peut porter sur les femmes un regard à la fois de respect et de sympathie. Il les voit, il les accueille, il converse avec elles, il accepte même de se laisser interpeller par elles. Que la tradition en ait conservé des traces est une énorme avancée.

J’ai terminé ma série d’exposés avec les textes de Paul, qui a souvent été accusé de misogynie, pour avoir, par exemple, demandé aux femmes de garder le silence dans les assemblées, ou de porter le voile, ou encore d’être soumises à leur mari. Ensemble, nous avons pourtant découvert un autre Paul, celui qui a eu des femmes collaboratrices qu’il respectait et qu’avec tendresse il nommait «sœurs». Nous avons aussi rencontré un Paul plus grand que toutes les accusations dont il était accablé depuis des siècles, en lisant des extraits de ses écrits marqués par sa conception de la liberté et de la réciprocité des droits.

Souvenons-nous de son très beau texte de Ga 3,28, selon lequel il n’y a plus ni juif, ni Grec, ni esclave, ni homme libre, ni mâle, ni femme. Ma conclusion était qu’il ne fallait pas donner plus d’importance aux textes disciplinaires de Paul, un homme de son temps, qu’à ses grands textes doctrinaux.

 

Les femmes dans l’Histoire

 

Au cours de quelques rencontres, des amies m’ont rappelé l’existence, tant dans l’Histoire qu’encore aujourd’hui, d’autres grandes femmes que celles de la Bible. On se dit évidemment qu’il faudrait spécialement saluer les fondatrices de communautés religieuses, qui se sont montrées sensibles aux besoins de leur temps, tout en étant libres vis-à-vis des autorités religieuses désireuses de les contrôler.

Dans le désordre, je pense spontanément à Amélie Fristel, Marguerite Bourgeoys, Émilie Gamelin, Esther Blondin, Marie Gérin-Lajoie, Marguerite d’Youville, Rosalie Jetté, Eulalie Durocher…, sans oublier évidemment Marie de l’Incarnation, qui a fondé un monastère des Ursulines en Nouvelle-France pour l’éducation des filles françaises et autochtones.

À part elles, les suivantes ont spécialement laissé leur marque chez nous : Jeanne Mance, Idola St-Jean, Thérèse Casgrain, Margot Power, Léa Roback, Denyse Gauthier, Lucille Teasdeale, Yvone Gebara, Françoise David, Manon Massé… J’aimerais pouvoir ici nommer celles que vous admirez spontanément, que vous avez aimées ou aimez toujours pour leur agir et surtout leur être. À vous de dresser votre liste. Pour ma part, j’ai les larmes aux yeux en pensant à Alice, Simonne, Clotilde, Aline, Pauline, Berthe, Bernadette…

Je m’en voudrais de quitter cette spirale de souvenirs sans avoir rappelé la mémoire de nos mères et grands-mères qui ont tracé la voie au féminisme, ont été créatrices de beauté, et ont entrepris de recycler tout en respectant l’environnement bien avant que surgissent les groupes écologistes.

 

Hommage particulier

 

Permettez-moi de rendre hommage à ma mère qui, tout en détenant un diplôme lui permettant d’enseigner, a dû attendre que ses enfants soient élevés avant de retourner à cette activité qu’elle aimait. Elle a mis au monde sept enfants. Réplique moderne de «la femme vaillante» du livre des Proverbes[1], elle travaillait sur la ferme, elle tricotait nos tuques et mitaines pour l’hiver, elle faisait tous nos vêtements[2], elle confectionnait des courtepointes, et elle accomplissait des miracles pour nourrir sa famille, sans parler de tous ceux qui, le dimanche midi surtout, se présentaient sans s’être annoncés.

Comme nous vivions à la campagne, la cousinaille échelonnait ses séjours chez nous pour passer l’été au grand air. Par ailleurs, il relevait de ma mère de s’occuper du très grand jardin, une nécessité pour nous assurer de quoi traverser l’hiver : conserves de légumes, confitures, marinades. Ma mère n’était pas une femme soumise, et elle ne comptait pas sur mon père pour la discipline des enfants. Elle avait une belle liberté vis-à-vis des lois religieuses et civiles. Je l’entends encore dire qu’elle ne jeûnait pas afin d’être patiente avec les enfants, et n’allait pas à la messe du dimanche quand les enfants étaient jeunes.

À une époque où les femmes devaient voter comme leur mari, ma mère disait : «Personne ne sait pour qui je vote quand je suis dans l’isoloir!» La Révolution tranquille n’est pas survenue comme un cheveu sur la soupe. Elle a été préparée de loin, par toutes ces femmes oubliées dont on ne parle pas et dont on ne parlera jamais, malgré qu’elles aient été de grandes femmes qui nous ont tracé le chemin.

Quand je pense à la ligne de vie suivie par Jésus et Paul, je suis scandalisée en leur nom qu’il n’y ait pas, dans l’Église, de femmes engagées au niveau décisionnel. Le message de Jésus n’a-t-il pas traversé les siècles? Leonardo Boff, un théologien de la libération a déjà écrit : «Sans les pauvres, l’Église perd son seigneur, et la théologie, son contenu évangélique.» Moi, je dis : sans les femmes, l’Église a perdu son sens.

Je vous souhaite de passer un bon été en lisant la biographie d’une femme que vous admirez. Je vous remercie pour votre fidélité à me lire, et suis reconnaissante à la Fondation Père-Ménard de m’avoir accueillie et permis d’écrire en toute liberté cette série de blogues dont vous venez de lire la dernière ligne.

 

Notes :

 

[1] Voir 31,10-31.

[2] Je me souviens d’un beau manteau d’hiver confectionné par ma mère. Mon oncle avait apporté de l’usine de vieux manteaux; elle les a décousus, remis à l’envers, taillés et cousus, en leur ajoutant à la fin un beau petit col en fourrure et quelques décorations. Soixante-dix ans plus tard, je me sens encore fière de mon beau manteau «neuf».

À PROPOS DE LUCIE LÉPINE

Après une carrière en enseignement au primaire et au secondaire, Lucie s’est impliquée au sein des groupes communautaires comme le Carrefour Familial Hochelaga et des associations chrétiennes comme le Centre de pastorale en milieu ouvrier, la Conférence religieuse canadienne et la Fondation de la jeunesse ouvrière, entre autres. Lucie a fait des études bibliques à l’Université de Montréal et aime la vitalité culturelle montréalaise.

 

Les opinions exprimées dans les textes sont celles des auteurs. Elles ne prétendent pas refléter les opinions de la Fondation Père-Ménard. Tous les textes publiés sont protégés par le droit d’auteur.

 

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