Conversations

Anne Godbout : Voyager pour mieux se retrouver

photo Miriam Castro

Par Miriam Castro

Conversations

3 avril 2024

Crédit photo : François Gloutnay / Présence

Voyageuse aguerrie depuis sa jeunesse, Anne s’est promenée dans plus de 45 pays sur les cinq continents. En 2000, elle a fait un voyage en Asie qui a transformé sa vie, notamment parce qu’elle a eu la vision de ce qui deviendra Spiritours, une agence spécialisée dans les voyages de ressourcement et les pèlerinages dans un souci de tourisme responsable et solidaire.

Originaire de la ville de Québec, Anne a grandi au sein d’une famille catholique. Après ses études au cégep, Anne a commencé à travailler dans une agence de voyages pour étudiants à Québec. Elle a eu l’opportunité de faire de beaux voyages en sac à dos. «Mon goût du voyage vient de mon grand-père. Quand j’étais petite, il nous racontait ses aventures, nous montrait des photos de lieux exotiques et nous ramenait des souvenirs. J’adorais l’écouter!»

 

Remise en question

 

Au bout de dix ans, Anne a commencé à se questionner sur sa mission dans la vie, sur le sens de son existence. Elle sentait qu’il y avait quelque chose qui ne marchait pas et qu’il fallait prendre le temps de réfléchir à ce qui comptait vraiment pour elle. «Alors, j’ai commencé à prier avec mon cœur, pas juste avec ma tête». Il fallait qu’elle ouvre son esprit aux champs de possibles. Un jour, elle est entrée dans une librairie pour chercher un cadeau pour sa filleule. La conseillère lui a apporté le livre «À chacun sa mission», de Jean Monbourquette. «À mon grand étonnement, elle m’a dit qu’elle avait l’intuition que ce livre pourrait m’intéresser.» Coïncidence ou signe de Dieu?

Ce livre est devenu son compagnon de voyage tout le long d’un périple en Asie du Sud-Est. Pendant trois mois, elle a travaillé sur elle-même, son identité, sa foi et sa spiritualité. Ce livre n’est pas un roman, c’est un manuel d’exercices pour apprivoiser la peur du changement, pour se détacher du passé et pour cibler les talents et les passions. Rendue au Vietnam, Anne a effectué un des derniers exercices du livre : une méditation profonde suivie d’une projection de soi cinq ans plus tard. «Alors, j’ai eu une vision de ce que je fais aujourd’hui. C’était clair, c’était comme un genre de rêve éveillé. Rien d’ésotérique. C’était le mariage de mes deux grandes passions : le voyage et la spiritualité. Mon être intérieur disait oui à une façon différente de voyager, cohérente avec mes valeurs et mes passions.»

En effet, ce qui la dérangeait (et la dérange encore) ce sont les grands resorts dans le Sud qui s’emparent des plages et des ressources naturelles de l’endroit. En plus, ils offrent des salaires très bas aux employés, car c’est malheureusement un modèle d’affaires motivé par l’appât du gain. À l’opposé, son souhait était de faire la promotion d’une forme de tourisme équitable et conscient.

 

Le début d’un rêve

 

De retour au Québec, Anne a continué à réfléchir sur la façon de concrétiser son rêve. Elle en a parlé à son patron de l’agence de voyages où elle travaillait à l’époque. Il a tout de suite vu le potentiel de l’idée et l’a encouragée à poursuivre son projet. Trois ans plus tard, Spiritours prenait son envol.

L’agence a commencé par offrir des voyages de ressourcement à ceux qui souhaitent prendre une pause dans leur vie et faire le point. «L’être humain est en quête de sens. Sans nécessairement adhérer à une religion, on peut quand même être spirituel. En fait, ce que je voulais, c’était tout simplement partager ce que moi j’avais vécu pour découvrir mon projet de vie». Plus tard, elle a également commencé à organiser des pèlerinages avec des accompagnateurs spirituels. Actuellement, Spiritours propose deux formules : Aux sources de l’être (voyages de ressourcement) et Aux sources de la foi (pèlerinages).

 

Dans les deux cas, il faut prendre le temps et avoir un rythme plus lent, pour qu’on puisse vraiment s’imprégner des lieux. Favoriser la rencontre avec la population locale, c’est très important pour nous. Ça permet de créer des liens aussi. On a des personnes qui voyagent avec nous depuis des années.

 

L’économie de communion

 

Anne a toujours été interpellée par les questions de l’œcuménisme et du dialogue interreligieux. C’est ainsi qu’elle a fait la découverte du mouvement ecclésial de Focolari[1] (mot italien qui signifie «foyers») dont le charisme est de coopérer à la construction d’un monde plus uni, inspiré par la prière de Jésus à son Père «afin que tous soient un» (Jn 17, 21), dans le respect et la mise en valeur de la diversité. Anne a eu l’opportunité de faire une immersion spirituelle chez des communautés de Focolari en Italie, au Kenya et aux Philippines. «Cette période a été vraiment une école de l’amour chrétien et, en même temps, une purification. Ça a été vraiment très fort, ce que j’ai vécu là-bas. J’ai pu approfondir ma relation avec Dieu, la spiritualité de l’unité, le sens de l’Évangile.»

Animé par un esprit de fraternité, d’égalité et de dignité, le mouvement international de Focolari a développé et adopté en 1991 l’économie de communion, qui s’inscrit dans la lignée de la doctrine sociale de l’Église catholique. Elle privilégie la relation interpersonnelle et vise à mettre en œuvre le don dans les relations économiques. Ainsi, cette philosophie de vie propose de créer ou de développer des entreprises qui partageront une part de leurs bénéfices pour diminuer l’écart entre les riches et les pauvres, tout en donnant une priorité à la relation, tendant à la réciprocité et à la communion. «Mais, ce n’est pas juste le partage de profits. Il s’agit de vivre l’Évangile dans le monde du travail, de voir Jésus dans chaque employé, client, partenaire, et même dans les compétiteurs. Pour moi, l’économie de communion est une pensée révolutionnaire et je l’ai adoptée dès le départ.»

En plus d’adhérer au partage des profits, Anne a créé en 2011 un Fonds de solidarité, d’abord pour permettre à des jeunes de vivre des voyages de ressourcement et pèlerinages, et plus tard pour permettre aussi aux personnes ayant vécu une situation d’itinérance, participantes dans un programme de réinsertion économique et social, de prendre une pause dans leur quotidien meublé de détresse et de désarroi pour ouvrir leurs yeux et leur cœur aux beautés du monde extérieur et intérieur. De ce fait, ils sont déjà partis au Lac-Bouchette, dans la région du Saguenay. Ils ont découvert la nature avec un frère capucin qui sert de guide lors de la randonnée.

 

Ils ont été touchés par l’accueil chaleureux, par la beauté de la nature. Ils sont souvent au centre-ville à quêter de l’argent. Là-bas, ils ont allumé un feu de camp et on fait chauffer des guimauves. Ç’a été un moment fort chez eux, car ils se sont rappelés leur enfance avec leur famille. Notre projet est d’offrir une formule similaire dans un chalet sur le bord d’un lac dans la région de Lanaudière sur une base régulière.

 

Spiritours propose de voyages uniques dans plusieurs destinations dans le monde, et compte plus d’une vingtaine de guides et d’animateurs spirituels expérimentés et passionnés. En 2019, pour marquer le 15e anniversaire de l’agence, Spiritours a lancé le livre «Voyages spirituels : 50 itinéraires de rêve autour du monde» publié aux Éditions Ulysse. Richement illustré, ce livre est une magnifique source d’inspiration pour imaginer votre prochain voyage.

 

Note :

 

[1] Mouvement fondé en 1943 par Chiara Lubich (1920-2008) à Trente, en Italie, durant la Seconde Guerre mondiale, comme un courant de renouveau spirituel et social. Approuvé en 1962, son appellation officielle est Œuvre de Marie. Le mouvement est présent dans plus de 180 pays et compte plus de 2 millions d’adhérents.

 

À PROPOS DE MIRIAM CASTRO

Passionnée des voyages et des nouvelles cultures, Miriam décide de s’établir au Québec et obtient une maîtrise en communication à l’UQAM, tout en travaillant comme directrice de la Fondation Père-Ménard. Lorsqu’elle n’est pas en train de courir pour faire sa méditation en mouvement, elle lit, regarde des séries ou partage un bon repas avec les gens qu’elle aime.

 

Les opinions exprimées dans les textes sont celles des auteurs. Elles ne prétendent pas refléter les opinions de la Fondation Père-Ménard. Tous les textes publiés sont protégés par le droit d’auteur.

 

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