Chroniques

Sur les pas de Jésus

photo Lucie Lepine

Par Lucie Lépine

Chroniques

27 janvier 2021

Crédit photo : KristiLinton / iStock

L’enfant né à Nazareth, dont j’ai parlé dans ma dernière chronique, n’est pas de la tribu de Lévi; il n’est donc ni prêtre ni lévite, et n’a pas le prestige que confèrent l’uniforme et la fonction officielle. Comme tous les gens de sa toute petite localité, c’est un analphabète; il n’est pas allé à l’école car il n’y a pas d’école à Nazareth, il n’y a d’ailleurs rien à lire à Nazareth.

 

Ce qui ne veut pas dire qu’il n’a pas profité de la culture orale, omniprésente à l’époque, et qu’il ne soit pas intelligent. Il apprend le métier de charpentier avec Joseph. Il travaille poutres, pierres et métal. Ouvrage dur et pénible. Il ne fait cependant pas partie d’une famille mendiante, car Joseph réussit à gagner la vie de sa famille.  À la mort de ce dernier, étant l’aîné, il hérite de son établi.

Un jour, il doit avoir entre 35 et 40 ans, Jésus entend dire qu’un grand prophète parle de justice en Judée et il sent en lui un appel pressant : il doit aller le rencontrer et l’écouter. Cette démarche va changer sa vie. Écoutant l’interpellation de Jean, il quitte famille et métier, et se laisse interpeller par la misère de son peuple. Il faut qu’il fasse sa part pour contrer les situations d’oppression dont il est témoin. Il forme une communauté avec Douze autres – la plupart, comme lui, faisant auparavant partie de l’entourage de Jean – pour réagir à un système centralisateur, et il passera le reste de sa vie à travailler quotidiennement à faire arriver le grand rêve de Dieu pour l’humanité.

 

Faire du pouvoir un service

 

Au lieu d’attendre que les gens viennent à lui, comme dans les synagogues, il va vers eux, se promène sur les routes avec un drôle de groupe : des pêcheurs qui ont laissé leur travail, des pécheurs qui trichent sur les impôts, des femmes, pas les plus respectées. Il s’est opposé à tout ce qui empêchait la vie des êtres humains. Le Dieu de Jésus est un Dieu pour qui les besoins fondamentaux passent avant la Loi.

«Le sabbat pour l’être humain et non l’être humain pour le sabbat.» Il guérit une femme courbée le jour du sabbat, alors qu’il est interdit de travailler : la santé, la dignité d’une pauvre femme lui tient à cœur. Il a voulu des femmes disciples et debout. Il croit en un Dieu de liberté.

 

Jésus renverse les concepts hiérarchiques. Quand on lui demande qui est le plus grand dans le Royaume, il prend un enfant et le met au centre, ce qui suppose une communauté rassemblée et non un simple regroupement d’individus désorganisés.  Il fait du pouvoir un service. 

Lucie Lépine

 

Le Maître doit servir. Il fréquente des gens autour de qui on avait fait le vide : les fonctionnaires au service de l’Empire, les malades en général, les femmes, les enfants qui n’ont pas de droits. Les ouvriers mal qualifiés ont droit à un salaire qui leur permette de vivre.

Jésus n’utilise pas ses dons de guérisseur pour sa renommée ou son profit, mais toujours pour repousser les frontières de la souffrance ou de la maladie, et au profit de gens qui ne peuvent se payer un médecin. Il fait arriver une bonne nouvelle aux pauvres qui sont au bas de la pyramide du système.  Il distribue le pain. Il veut donner un peu d’espérance à ceux qui n’ont pas de raison d’espérer.

 

Dénoncer le pouvoir au service de ses propres intérêts

 

Un jour, sans qu’on sache trop pourquoi, Jésus décide de monter à Jérusalem, où il condamne le Temple, devenu un lieu de pouvoir au service de ses propres intérêts.  Ça ne pouvait pas bien finir.  Il sent le besoin de partager un repas avec ses partisans et leur dit en rompant le pain : «Ceci est mon corps». Ce qui veut dire : «C’est tout moi, c’est bien moi. Vous avez partagé mes rêves, j’espère que vous allez continuer de vivre dans cette ligne.» Il se retire avec eux au Jardin des Oliviers, où on l’arrête, sur la trahison d’un ami.  Il sera exécuté quelques heures plus tard.

Ce Jésus est inspirant, et je pense qu’il est important d’essayer bien humblement de suivre la route qu’il a tracée. Je crois que vivre en ce sens pourrait faire arriver un monde plus humain.  Pour ce faire, cependant, il faut partager le sens de la Bonne Nouvelle qu’il proclamait.

 

Proclamer la Bonne Nouvelle

 

La Bonne Nouvelle pour un malade, c’est d’être guéri; pour quelqu’un qui n’a pas de logement, c’est d’en trouver un à un prix raisonnable; pour quelqu’un qui n’a pas d’emploi, c’est d’arriver à gagner le pain quotidien, l’épanouissement de ses talents et la possibilité de les partager au service de l’humanité. La Bonne Nouvelle pour quelqu’un qui vit l’isolement, c’est de faire des rencontres significatives. La Bonne Nouvelle pour quelqu’un qui est marginalisé, c’est de retrouver sa dignité.

Le Dieu de Jésus est un Dieu de liberté, présent dans une famille humaine qui se soucie des plus pauvres, et s’oppose à tout système fondé sur les privilèges de quelques-uns, États ou individus.

Malheureusement, les gens qui possèdent le pouvoir – qu’il soit d’ordre politique, économique, social, physique, religieux, etc. – réagissent toujours mal à la présentation d’un projet de société qui menace tant soit peu leurs intérêts.  Marcher sur le chemin de Jésus n’est donc pas chose simple, et est inévitablement source de tensions plus ou moins grandes.  C’est pourquoi il est important d’être soutenu par une communauté, ce qui fera l’objet de ma prochaine chronique.

 

À PROPOS DE LUCIE LÉPINE

Après une carrière en enseignement au primaire et au secondaire, Lucie s’est impliquée au sein des groupes communautaires comme le Carrefour Familial Hochelaga et des associations chrétiennes comme le Centre de pastorale en milieu ouvrier, la Conférence religieuse canadienne et la Fondation de la jeunesse ouvrière, entre autres. Lucie a fait des études bibliques à l’Université de Montréal et aime la vitalité culturelle montréalaise.

 

Les opinions exprimées dans les textes sont celles des auteurs. Elles ne prétendent pas refléter les opinions de la Fondation Père-Ménard. Tous les textes publiés sont protégés par le droit d’auteur.

 

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