Suggestions de lecture

Sapiens, une réflexion historique pour l’avenir de l’humanité

photo Renée Thivierge

Par Renée Thivierge

Suggestions de lecture

20 novembre 2019

Yuval Noah Harari est né en Israël en 1976. Il est historien et professeur à l’Université hébraïque de Jérusalem. D’abord écrit en hébreu, Sapiens est maintenant publié dans plus de 20 pays et survole l’histoire de l’humanité à partir de l’âge de pierre jusqu’au XXIe siècle.

 

D’une révolution à l’autre

 

L’ouvrage se divise en quatre parties. D’abord la révolution cognitive (il y a soixante-dix mille ans) où les êtres humains (homo sapiens) n’étaient que des animaux insignifiants « sans plus d’impact sur leur milieu que des gorilles, des lucioles ou des méduses. »

Puis la révolution agricole (il y a environ 10 000 ans), alors que « les Sapiens se mirent à consacrer la quasi-totalité de leur temps et de leurs efforts à manipuler la vie d’un petit nombre d’espèces animales et végétales. De l’aurore au crépuscule, ils se mirent à semer des graines, à arroser les plantes, à arracher les mauvaises herbes et à conduire les troupeaux vers des pâturages de choix. »

Après la révolution agricole survient l’unification de l’humanité. « Mythes et fictions, explique l’auteur, habituèrent les gens, quasiment dès la naissance, à penser de certaines façons, à se conformer à certaines normes, à vouloir certaines choses et à observer certaines règles. Ce faisant, ils créèrent des instincts artificiels qui permirent à des millions d’inconnus de coopérer efficacement. »

 

Crédit photo : Santander Global Tech

 

S’ensuit la révolution scientifique (depuis voici seulement 500 ans). « Les cinq cents dernières années ont connu un essor phénoménal et sans précédent de la puissance de l’homme. » Pour illustrer l’importance de cet essor, l’auteur nous suggère cette image :

« Imaginons un paysan espagnol qui se serait endormi en l’an mille pour se réveiller cinq siècles plus tard, au vacarme des marins de Christophe Colomb embarquant à bord de la Niña, la Pinta et la Santa Maria : le monde lui aurait paru très familier. Malgré les multiples changements de techniques, de mœurs et de frontières politiques, ce Rip Van Winkle du Moyen Âge eût été à l’aise. Mais un matelot de Christophe Colomb qui aurait sombré dans un sommeil analogue pour se réveiller à la sonnerie d’un iPhone du XXIe siècle se retrouverait dans un monde étrange, voire totalement incompréhensible.»

 

Augmentation des populations et imagination collective

 

Pour Yuval Noah Harari, une étape importante de notre humanité se situe dans le passage de groupes ou bandes de 150 individus à de plus importants rassemblements. « Aujourd’hui encore, explique-t-il, le seuil critique de la capacité d’organisation humaine se situe autour de ce chiffre magique. En deçà de ce seuil, les communautés, les entreprises, les réseaux sociaux et les unités militaires peuvent se perpétuer en se nourrissant essentiellement de connaissance intime et de rumeurs colportées. »

« Une fois franchi le seuil de 150 individus, cependant, les choses ne peuvent plus fonctionner ainsi, précise-t-il. On ne conduit pas une division forte de milliers de soldats comme on dirige un peloton. Les entreprises familiales qui réussissent traversent généralement une crise quand elles prennent de l’importance et embauchent du personnel. Si elles ne savent pas se réinventer, elles font faillite. »

La fiction vient alors à la rescousse, alors que « de grands nombres d’individus peuvent coopérer avec succès en croyant à des mythes communs. » Ces mythes n’existent en fait que dans l’imagination collective, et c’est le cas par exemple des Églises ou des systèmes judiciaires. « Il n’y a pas de dieux dans l’univers, souligne l’auteur, pas de nations, par d’argent, pas de droits de l’homme, ni lois ni justice hors de l’imagination commune des êtres humains. »

 

Nous croyons à un ordre particulier : non qu’il soit objectivement vrai, mais parce qu’y croire nous permet de coopérer efficacement et de forger une société meilleure.

Yuval Noah Harari

 

Le cycle de la violence

 

La lecture de Sapiens nous apprend qu’aux tout débuts de l’humanité, la violence était monnaie courante. Ainsi l’exigeait la survie. Mais peu à peu, on constate surtout dans les sept dernières décennies que le nombre des guerres a effectivement diminué. Entre autres, « les armes nucléaires ont transformé une éventuelle guerre de superpuissances en suicide collectif et, de ce fait, ont interdit de chercher à dominer le monde par la force des armes. » De plus, « si la guerre est devenue moins profitable, la paix est plus lucrative que jamais.

On pense maintenant beaucoup plus aux avantages d’une coexistence pacifique. « Tant que la Chine et les États-Unis sont en paix, fait remarquer l’auteur, les Chinois peuvent prospérer en vendant leurs produits aux Américains, en négociant à Wall Street et en accueillant les investissements américains. »

Mais l’auteur met l’accent sur une autre violence, celle faite aux animaux qui permettent les avancées technologiques et ceux qui nous nourrissent. « Les défenseurs des droits des bêtes dénoncent les souffrances infligées aux animaux de laboratoire du fait des expériences de génie génétique, mais aussi aux animaux de ferme qui sont manipulés au mépris total de leurs besoins et de leurs désirs. »

Pensons à ces poussins sélectionnés sur un tapis roulant, aux truies allaitantes confinées « dans des caisses si étroites qu’elles sont littéralement incapables de se retourner (sans parler de marcher ou de fourrager). » Et les exemples foisonnent…

 

Crédit photo : Don Pinnock – Daily Maverick

 

Et maintenant?

 

Dans son épilogue, l’auteur pose finalement un regard plutôt inquiet sur l’avenir de cette humanité et souligne les « ravages parmi les autres animaux et dans l’écosystème ».

« Nous avons maîtrisé ce qui nous entoure, soutient-il, accru la production alimentaire, construit des villes, bâti des empires et créé de vastes réseaux commerciaux. Mais avons-nous fait régresser la masse de souffrance dans le monde ? […] Des canoës nous sommes passés aux galères puis aux vapeurs et aux navettes spatiales, mais personne ne sait où nous allons. »

 

Nous sommes plus puissants que jamais, mais nous ne savons trop que faire de ce pouvoir

Yuval Noah Harari

 

Et il se pose la question suivante : n’existe-t-il pas « rien de plus dangereux que des dieux insatisfaits et irresponsables qui ne savent pas ce qu’ils veulent ? »

Mais alors, si l’Homo Sapiens est ce qu’il est, s’il a pu traverser tous ces millénaires et survivre, ne saura-t-il pas relever cet impressionnant défi de sauver sa planète des innombrables maux qui la menacent? C’est la question que je me pose…

 

À PROPOS DE RENÉE THIVIERGE

Journaliste, auteure, traductrice et dramaturge, Renée s’intéresse depuis toujours à la philosophie et à la spiritualité. La beauté et l’humain sont ses meilleures sources d’inspiration et elle croit passionnément au pouvoir des mots afin de repousser et teinter de poésie les limites d’un monde souvent filtré et médiatisé.

 

Les opinions exprimées dans les textes sont celles des auteurs. Elles ne prétendent pas refléter les opinions de la Fondation Père-Ménard. Tous les textes publiés sont protégés par le droit d’auteur.

 

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