Conversations

Deux rencontres marquantes dans la vie des pères Girard

photo Renée Thivierge

Par Renée Thivierge

Conversations

22 janvier 2020

Le père Guy Girard est un homme affable et généreux de ses anecdotes et de ses réflexions. Son frère jumeau identique s’appelle Armand. Ils ont été ordonnés prêtres en 1964. Ensemble, ils ont vécu des rencontres déterminantes qui ont laissé des traces importantes tout le long de leurs vies.

 

Diriger des âmes

 

Les frères Girard sont nés en 1936, dans la municipalité de Compton, à une vingtaine de kilomètres de Sherbrooke. Ils ont passé une bonne partie de leur vie à faire de la direction spirituelle. À l’époque, on utilisait le terme directeur de conscience. Maintenant, on parle plutôt de directeur spirituel ou conseiller spirituel.

Le père Girard définit bien ce rôle.  « Le rôle de directeur spirituel, c’est d’écouter la personne qui vient le rencontrer et de la diriger en quelque sorte tout en respectant sa personnalité. Sans vouloir la changer. C’est à la fois de l’aide sur le plan du développement humain, et aussi, et surtout, de l’aide sur le plan du développement spirituel. »

Et si la personne doute? « On doit l’inviter à accepter ses doutes, explique le père Girard. C’est à ce moment-là que la foi grandit. »

Et comment guider celui qui par exemple doute de sa vocation? « Il y a toujours la question de la fidélité à soi-même, répond le père Girard. Des individus peuvent penser s’unir à Dieu et se rendre compte que, non, ce n’est pas leur place. Cela devient une purification que l’individu doit accepter, qu’il doit offrir pour l’Église et pour le salut du monde. »

 

La rencontre d’une mystique

 

Guy et Armand ont écrit Alliance, qui raconte l’histoire de Georgette Faniel, une mystique née à Montréal le 8 juillet 1915. Sa vie spirituelle a commencé à six ans alors qu’elle entend la voix de Jésus, de Marie puis celle du Père éternel et de l’Esprit saint. Il s’agit bien plus d’une conversation que de l’écoute d’une voix.

 

Elle entendait la voix au niveau de l’oreille. C’était audible, et pas seulement dans son cœur.

Guy Girard

 

La première rencontre du père Guy Girard avec celle qu’on appelait affectueusement Mimi a eu lieu le 16 mai 1978 :

« J’étais à Granby et je terminais une retraite. Le lendemain, je m’étais rendu chez Georgette Faniel en compagnie d’un groupe et j’avais demandé aux personnes présentes de ne pas dire que j’étais prêtre. Elle nous a tous accueillis dans une petite pièce qui était sa chambre d’enfant, transformée en chapelle. Après l’avoir rencontrée brièvement pour une courte prière, elle me déclare : “Vous êtes prêtre. Le Seigneur me l’a dit quand vous avez monté l’escalier.”»

Ensuite, Mimi ajoutait : « Le Père éternel m’a demandé d’être la mère spirituelle de vous et de votre frère, c’était le jour de votre ordination, vous étiez dans un collège situé dans l’est de la ville. Vous avez été ordonné et vous étiez sept futurs prêtres. »

Le père Girard a été plus qu’impressionné. Comment pouvait-elle avoir su que l’événement avait eu lieu dans un collège de l’est de la ville et que nous étions sept à être ordonnés?

 

Georgette Faniel au Chalet du Mont-Royal

 

Mais c’est le 20 juin 1982, c’est-à-dire dix-huit ans après notre ordination, qu’elle les rencontrera tous les deux ensemble et que le 8 décembre 1982 en la fête de L’Immaculée Conception, à la demande de la Vierge Marie, ils deviendront ses conseillers spirituels jusqu’à son décès le 2 juillet 2002.

Comme ils étaient aumôniers à l’hôpital Notre-Dame, et ce, pendant vingt ans, l’un ou l’autre des frères allait quotidiennement célébrer la messe dans le minuscule sanctuaire de Mimi.

Consacrée au service des pauvres, cette femme simple et authentique a vécu une vie marquée par la maladie et la souffrance, et a connu comme d’autres le mariage mystique et la transfixion. Dotée entre autres du don de prophétie et de celui des langues, elle est demeurée humble et à l’écoute des gens.

 

De gauche à droite : Armand Girard, Vicka, Georgette Faniel et Guy Girard.

 

Elle a connu les doutes et les tentations, mais elle s’est toujours offerte en un don total. Pour le père Girard, nul doute dans son esprit. « Georgette Faniel dialoguait avec Dieu. Mais le meilleur terme, c’est qu’elle causait avec Dieu. D’après moi, c’est peut-être l’une des plus grandes mystiques de l’histoire de l’Église. »

 

Un modèle et une inspiration

 

Une autre belle rencontre déterminante pour les deux frères, celle du père Eusèbe Ménard, qui les a guidés dans leur choix du sacerdoce et de la communauté où ils allaient tous les deux œuvrer : la Société des Missionnaires des Saints-Apôtres. Vers seize ans, les pères Guy et Armand Girard ont été invités à rencontrer le père Ménard qui dirigeait un séminaire consacré aux vocations tardives.

 

C’était un homme de Dieu. Un homme éclatant. En parlant avec lui, je voyais qu’il était authentique. Sa foi était immense. Être en sa présence, c’était comme être en présence de Jésus. C’était aussi un excellent prédicateur, profondément imprégné de l’enseignement de François d’Assise dont il admirait la simplicité de vie, la pauvreté, l’amour de la nature, et aussi le fait qu’il savait découvrir Dieu à travers la création, et aussi à travers nos frères.

Guy Girard

 

La rencontre la plus marquante a eu lieu le jour où le père Ménard est décédé chez les franciscains, à Rosemont, où il avait été hospitalisé :

« Je me suis rendu auprès de lui. Il avait le visage complètement défiguré par la maladie. Et j’ai alors vu le visage du Christ en croix. J’ai toujours aimé le père Ménard, sa conviction de la valeur de l’eucharistie. Aussi sa foi dans le sacerdoce et dans les vocations sacerdotales. Mais de le rencontrer comme ça en fin de vie et de voir son visage aussi brisé… C’était vraiment le visage de Jésus. »

 

Eusèbe Ménard et Armand Girard

 

D’abord unis par ce lien fusionnel à la naissance, ces frères jumeaux ne se sont jamais vraiment séparés dans l’accomplissement de leur mission. Identité ou instrument, la prêtrise constitue leur bâton de pèlerin dans cette longue marche vers le salut d’autres âmes.

Pour en savoir plus :

 

Girard, Guy et Armand Girard (2016),  Alliance. Paris : Les éditions Sakramento (disponible à la Fondation)

Gauthier, Jacques (2018), Georgette Faniel, le don total, Montréal : Novalis (disponible à la Fondation)

Les photos de Georgette Faniel ont été prises du site Internet www.georgettefaniel.com

 

À PROPOS DE RENÉE THIVIERGE

Journaliste, auteure, traductrice et dramaturge, Renée s’intéresse depuis toujours à la philosophie et à la spiritualité. La beauté et l’humain sont ses meilleures sources d’inspiration et elle croit passionnément au pouvoir des mots afin de repousser et teinter de poésie les limites d’un monde souvent filtré et médiatisé.

 

Les opinions exprimées dans les textes sont celles des auteurs. Elles ne prétendent pas refléter les opinions de la Fondation Père-Ménard. Tous les textes publiés sont protégés par le droit d’auteur.

 

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